Après avoir appris pendant six ans le métier d’acteur et passé cinq ans à travailler dans un vidéo-club devenu fameux (le Vidéo Archives d’Hermosa Beach, près de Los Angeles), Quentin Tarantino écrit ses premiers scénarios et ce Reservoir Dogs, inspiré de L’Ultime Razzia (The Killing, 1956) de Stanley Kubrick : « J’ai écrit le film dans le même esprit qu’un livre, des têtes de chapitre introduisant les différentes scènes. C’est une histoire intrigante mais aussi très drôle. En fait, c’est l’histoire à deux sous que j’ai toujours rêvée d’écrire. Elle possède un côté années 1950 que je désamorce en utilisant des morceaux de musique typiques des années 1970. La bande originale constitue un formidable contrepoint à l’action. » Nouveaux venus dans le métier, Tarantino et son producteur Lawrence Bender pensent tourner avec les moyens du bord : « Lawrence et moi étant acteurs de formation, nous étions prêts à incarner respectivement les rôles de Mr. Pink et de "Nice Guy" Eddie, des amis pouvant compléter la distribution. » Monte Hellman, le réalisateur de Macadam à deux voies (Two-Lane Blacktop, 1971), après lecture du scénario, envisage de tourner le film, mais s’incline devant la volonté de Tarantino de le faire lui-même. Et sur l’impulsion d’Harvey Keitel, le budget s’étoffe. Le casting, regroupant un florilège d’acteurs du cinéma indépendant américain, ajoute au prestige de ce bijou du film noir. Le résultat stupéfie la planète, à commencer par le festival de Sundance. Jeune inconnu en y arrivant (il y avait juste fait un stage d’été), Tarantino devient l’objet d’un culte. En octobre 1992, Philippe Garnier (par ailleurs programmateur de The Art of Noir au festival Lumière et auteur d’un livre sur Charles Brabin en 2012) le rencontre à Los Angeles pour Les Inrockuptibles : « le zinzin d’Hollywood », comme le journaliste le baptise, se dévoile. On y apprend notamment sa passion pour la Nouvelle Vague, Melville, Godard, mais aussi pour Henri Verneuil : « Je ne me souviens pas d’un âge où le cinoche, pour moi, ne primait pas déjà sur tout. » Après Sundance, le film est révélé à Cannes, et connaît dès lors une irrésistible carrière internationale. Tarantino signe un polar « violent et drôle » (deux adjectifs qu’on accolera souvent pour le décrire), où l’humour noir côtoie le rouge sang, qui dessine déjà les contours d’une filmographie prometteuse. Monte Hellman fut stupéfait du résultat final : « Quentin saisit vraiment la façon de parler qui règne dans un certain milieu, et l’intrigue est tout à fait exceptionnelle. Je n’ai jamais rencontré un réalisateur qui maîtrise à ce point son sujet dès son premier film et qui sache aussi précisément de quelle manière il veut le tourner. »
Sundance Film Institute
À l’été 1991, Tarantino est admis au Sundance Film Institute de Robert Redford dans le cadre du laboratoire des cinéastes. Il y répètera et tournera en vidéo certaines scènes avec Steve Buscemi, sous l’œil avisé de Terry Gilliam, conseiller du laboratoire cet été-là. Le film terminé sera présenté en avant-première mondiale au festival de Sundance l’année suivante.
Une tournée mondiale
Après Sundance et Cannes, le volubile Tarantino se lance dans une véritable tournée mondiale. Il enchaîne près d’un millier d’interviews, n’en refusant aucune, et présente Reservoir Dogs dans de nombreux autres festivals où le film remporte une dizaine de récompenses.
Edward Bunker, ancien gangster
Edward Bunker, qui interprète le rôle de Mr. Blue est un personnage connu d’Hollywood. Ce pur produit de l’Amérique des années 1940 a passé sa jeunesse entre maisons de redressement, prisons et cavales. Soutenu par quelques vedettes d’Hollywood, il réussit à percer et devient auteur de romans policiers et scénariste.
Tournage dans une ancienne maison funéraire
Le hangar choisi par Tarantino comme scène principale de son film fut une véritable maison funéraire du quartier de Highland Park à Los Angeles – morgue abandonnée en l’état : cercueils, corbillards, liquides d’embaumement sont encore en place. Il est décidé de ne pas modifier le décor.
Harvey Keitel, locomotive du projet
Avec les 50 000 dollars obtenus pour le script de True Romance, que Tony Scott réalise en 1993, Tarantino décide de tourner lui-même Reservoir Dogs. « Le budget était dérisoire, et j’étais prêt à tourner à la sauvette, en noir et blanc, et en 16 mm. » Son ami et producteur Lawrence Bender discute du projet avec son professeur d’art dramatique, Lily Parker, et lui indique que le choix idéal d’acteur pour ce film se porterait sur Harvey Keitel. Par chance, Lily Parker le connaît et lui envoie le script. Séduit par le scénario, l’acteur accepte et aide le duo Tarantino-Bender à réunir l’argent nécessaire. Grâce à ses contacts, le budget passe à plus d’un million de dollars.
Reservoir Dogs
États-Unis, 1992, 1h39, couleurs (Eastmancolor), format 2.35
Réalisation & scénario : Quentin Tarantino
Photo : Andrzej Sekula
Musique : George Baker (Little Green Bag), Blue Swede (Hooked on A Feeling), Joe Tex (I Gotcha), Bedlam (Magic Carpet Ride), Sandy Rogers (Fool for Love), Stealers Wheel (Stuck In The Middle With You), Bedlam (Harvest Moon), Harry Nilsson (Coconut), Nikki Bernard (Wes Turned Country), Peter Morris (Country’s Cool), Henrik Nielson (It’s Country)
Montage : Sally Menke
Décors : David Wasco
Costumes : Betsy Heimann Production : Lawrence Bender, Monte Hellman, Richard N. Gladstein, Harvey Keitel, Dog Eat Dog Productions Inc., Live America Inc.
Interpretes : Harvey Keitel (Mr. White), Tim Roth (Mr. Orange), Michael Madsen (Mr. Blonde), Steve Buscemi (Mr. Pink), Lawrence Tierney (Joe Cabot), Randy Brooks (Holdaway), Eddie Bunker (Mr. Blue), Quentin Tarantino (Mr. Brown), Kirk Baltz (Marvin Nash), Lawrence Bender (un jeune policier), Chris Penn ("Nice Guy" Eddie Cabot)
Présentation au Festival de Sundance : 21 janvier 1992
Sortie aux États-Unis : 23 octobre 1992
Présentation au Festival de Cannes : 13 mai 1992
Sortie en France : 2 septembre 1992
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