Billetterie

Persona

de Ingmar Bergman , Suède , 1966

Elisabet Vogler (Liv Ullmann) est une actrice à succès. Un soir, alors qu’elle interprète Electre, la parole lui manque. Le lendemain, sa gouvernante la retrouve au lit, les yeux dans le vague, semblant poursuivre un rêve intérieur. Après plusieurs mois de traitement à l’hôpital, son médecin lui conseille d’aller se reposer au bord de la Baltique. Elle s’y fera accompagner par Alma son infirmière (Bibi Andersson). De rêves en confessions, les deux femmes se lient d’une amitié profonde mais brûlante…

personaPersona est le vingt-septième film – et combien de chefs-d’œuvre ? - réalisé en vingt ans, sans compter ceux tournés pour la télévision. Qui a fait mieux ? Woody Allen ? Et surtout, Bergman dévoile là une nouvelle et extraordinaire facette de son travail. Choisissant d’articuler son propos autour de la notion de dédoublement, des différents rôles que l’on endosse au cours d’une vie et de la difficulté à les assumer, il livre une réflexion sur l’art, embryon du film à venir tant au niveau spirituel que dans l’origine médicale du sujet : « Soignant et malade deviennent aussi proches que nerf et chair » (Ingmar Bergman, le magicien du Nord, N.T. Binh, Gallimard, 1993). Sur le plan formel, Persona permet à Bergman d’encore inventer visuellement, d’imaginer une nouvelle liberté dans le récit, le jeu des comédiens. « Ce n’est pas à proprement parler un scénario que j’ai écrit, déclare Bergman avant de tourner. C’est plutôt une partition, que j’espère orchestrer au cours du tournage. Le sujet que j’ai choisi est immense. C’est pourquoi j’invite les spectateurs à faire appel à leur imagination pour assimiler la matière que je mets à leur disposition. » Liv Ulmann, une jeune actrice norvégienne née à Tokyo, accède à la notoriété en endossant de façon impressionnante un rôle quasi muet – quand Bibi Andersson, une fidèle du cinéaste (ils feront treize films ensemble), voit sa parole couler à flots. Interrogeant le malaise de l’artiste face à l’éloignement de la réalité, Bergman signe sans doute son film le plus expérimental. Et l’un de ses plus accomplis. En octobre 1967, Michel Ciment écrit dans Positif : « Persona, qui part de cette idée que l’art est insignifiant, finit par céder aux prestiges de l’art. Le film a beau nous dire que l’art est égoïste, qu’il fait souffrir les autres, il exerce en même temps son pouvoir d’illusion, comme la lanterne magique de Vogler dans Le Visage. Bergman ne nous livrera que des fragments d’un film en en soulignant la vanité, nous montrera, outre le réalisateur, le projecteur, la pellicule, la projection, l’envers ou l’arrière si l’on veut de l’écran. » Ce chef-d’œuvre s’inscrit définitivement dans l’histoire du cinéma, comme en témoignent les propos de Martin Scorsese lors de son entretien avec Stig Björkman, réalisateur de Jeux de tournage (Bilder Fran Lekstugan, 2009) – images des archives personnelles de Bergman, restaurées par la Fondation Ingmar Bergman, avec le soutien de la World Cinema Fondation  : « On a vu Persona, et il est allé soudainement plus loin que tous les autres. Voir ce film pour la première fois était si palpitant, et c’était terrifiant – ça disait : "Voyez cela! Que pouvez-vous dire maintenant sur les films et sur ce qu’ils peuvent faire ?" »

Un film salvateur
En 1963, Ingmar Bergman est nommé à la tête du Théâtre royal de Stockholm. Ses activités théâtrales l’épuisent et une double pneumonie le conduira à l’hôpital pour plusieurs semaines. Pendant ce séjour, il choisit de s’isoler, de ne répondre à aucun courrier, ni aucun appel, laissant libre cours à ses visions animées par la fièvre. Dans un sursaut de lucidité, il notera ses impressions, inspiration et début du scénario de Persona. « J’ai dit un jour que Persona m’avait sauvé la vie, écrira-t-il. Ce n’était pas une exagération. Si je n’avais pas trouvé la force de faire ce film-là, j’aurai sans doute été un homme fini. »

Persona, Alma et Carl Jung
Le premier titre du film était Cinématographie, que Bergman délaisse pour lui préférer Persona, mot latin désignant les masques derrière lesquels dans l’Antiquité les acteurs dissimulaient leur visage. « Je tenais là un titre particulièrement adéquat car finalement tel était le sujet de mon film : les masques que portent les gens » confiera-t-il. Pour le psychanalyste suisse Carl Gustav Jung, la souffrance humaine vient du conflit entre le persona, le masque social, et l’alma, le subconscient. Alma, prénom de l’infirmière…

Rencontre avec une muse et compagne
Persona est la première collaboration au cinéma entre Ingmar Bergman et Liv Ullmann. Frappé par sa ressemblance avec Bibi Andersson qu’il a déjà fait tourner à plusieurs reprises, Bergman écrit le scénario du film pour ces deux actrices. « Qu’aurait été ma vie si Liv Ullmann ne s’était chargée à la fois de moi et d’Elisabet ? » s’interrogera le cinéaste.



Persona
Suède, 1966, 1h25, noir et blanc, format 1.37
Réalisation & scénario : Ingmar Bergman
Photo : Sven Nykvist
Musique : Lars Johan Werle
Montage : Ulla Ryghe
Décors : Bibi Lindström
Costumes : Mago
Production : Ingmar Bergman, Svensk Filmindustri
Interprètes : Bibi Andersson (Alma), Liv Ullmann (Elisabet Vogler), Margaretha Krook (le médecin), Gunnar Björnstrand (Monsieur Vogler), Jörgen Lindström (le fils d’Elisabeth)


Sortie en Suède : 18 octobre 1966
Sortie en France : 5 juillet 1967

COPIE  RESTAURÉE
Svenk Filmindustri StudioCanal

En partenariat avec StudioCanal, copies restaurées par Svensk Filmindustri
Distributeur : StudioCanal
La restauration a débuté en reprenant le négatif 35mm qui a été scanné en fichiers dpx 2K. Un master a été créé à partir des fichiers en utilisant, quand cela était possible, le matériel de référence. Après cette étape, le principal outil de restauration, Phoenix, a permis de supprimer toute poussière, rayure et autres défauts. Un Master a été créé sur support HDCAM SR et archivé les fichiers 2K sur support LTO.



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