Le Déserteur / Je t’attendrai

Né en Russie, à Odessa, en 1899, Léonide Moguy débute dans le cinéma russe en 1918 et continue en France après son arrivée, en 1929. Cinéaste de talent et découvreur de vedettes (on lui doit le premier vrai film de Michèle Morgan, Le Mioche en 1936), il réalise une vingtaine de films, tournés entre la France, les États-Unis, où il émigre en 1940, et l’Italie. Parmi ses œuvres, on se souvient notamment de Prison sans barreaux (1938), Paris After Dark (1943), Bethsabée (1947) et Donnez-moi ma chance (1957). Jean Aurenche, illustre scénariste, à qui l’on devra, entre autres, les excellents L’Auberge rouge (1951), La Traversée de Paris (1956), L’Horloger de Saint-Paul (1974), ou encore Coup de torchon (1981), vient de terminer l’écriture d’Hôtel du Nord de Marcel Carné (1938) lorsqu’il collabore avec Léonide Moguy. Aurenche, pour qui scénariser, c’était être voyant, « montrer la nature humaine, reproduire la vérité » (Jean Aurenche, La Suite à l’écran, Institut Lumière/Actes Sud, 1993), forme un duo efficace avec le cinéaste, dont il partage les mêmes visions. Le style de Moguy se caractérise par une franchise sans concession et des affrontements directs qui détonent avec le ton de l’époque, le tout parfaitement rythmé, structuré et dialogué par Aurenche. Le Déserteur, avec sa sublime photographie et son intrigue tragique, se pare « d’une rigueur de mise en scène et une sobriété dramatique sans effets. Un souffle haletant, un rythme oppressant et une tension à la limite de la rupture. » (H.et M. Oms, Cahiers de la Cinémathèque, 1984).

Django Unchained, hommage
Le personnage campé par Dennis Christopher dans Django Unchained se nomme Léonide Moguy. Hommage de Quentin Tarantino au réalisateur cosmopolite d’origine russe. Et c’est Pierre Rissient qui a tenu à lui montrer cette pure rareté sur un écran français.

Censure militaire
Le film sort en mars 1939 sous le titre Le Déserteur.  Mais la censure, et plus particulièrement l’Union nationale  des anciens combattants, exige que son titre soit modifié : dès novembre 1939, il est exploité sous le titre Je t'attendrai.