Billetterie

Le Chanteur de jazz

The Jazz Singer

de Alan Crosland , États-Unis , 1927

New York. Le vieux chantre Rabinowitz (Warner Oland) souhaite que son fils Jakie (Al Jolson) lui succède au sein du chœur de la synagogue. Mais Jakie préfère chanter du ragtime dans les bars. Le jeune homme est renié par le patriarche. Il quitte le foyer, promettant de ne jamais revenir. Quelques années plus tard, à San Francisco, alors qu’il mène sa carrière de chanteur de jazz, il obtient le rôle vedette dans un spectacle à Broadway. Il revient à New York.

le-chanteur-de-jazzVoilà un film dont la réputation se réduit malheureuseùent à la prouesse technique qui lui a donné vie : Le Chanteur de jazz est connu pour être le premier film sonore et parlant. Plus exactement, un film muet accompagné d’une compilation musicale pour orchestre, avec un son synchrone intermittent pour les chansons, ainsi que pour le monologue historique d’Al Jolson. Mais avant toute chose, disons-le : Le Chanteur de jazz est aussi un très bon film, un des meilleurs de la fin des années 1920.
À l’origine : une nouvelle d’Alfred Cohn, The Day of Atonment, ainsi que la pièce mise en scène à Broadway par Samson Raphaelson, futur scénariste attitré de Lubitsch. Bien que ce ne fût pas le premier film utilisant le système Vitaphone, ce fut le premier long métrage hollywoodien parlant, où des dialogues contribuaient à la progression de la dramaturgie. Certes, le film est partiellement parlant, la technique, l’expérience et la volonté n’étaient pas complètement là. La partition musicale se compose de mélodies de Tchaïkovski, de musiques traditionnelles juives et de ballades populaires, et d’effets spéciaux musicaux qui accompagnent l’action des cartons d’intertitres au long du film. L’événement et le succès que connut Le Chanteur de jazz furent aussi liés au talent d’Al Jolson, une superstar de l’époque. Il offre une belle exubérance à sa performance, comme en témoigne la scène culte de l’improvisation avec Eugenie Besserer. Le film est aussi le reflet de la trajectoire de toute une génération de Juifs américains : « Artistiquement, Al Jolson avait intégré les traditions d’un ancien monde yiddish pour les adapter à celles du Nouveau Monde américain, et effectue le choix du melting-pot pour devenir américain d’abord, juif ensuite. Un destin identique à celui de ses producteurs, les frères Warner, et de toute la génération de Juifs d’Europe centrale qui ont fondé Hollywood. Lorsque le cinéma prend pour la première fois la parole, c’est pour raconter une saga familiale, celle de ceux qui ont façonné le cinéma américain. » écrit justement Samuel Blumenfeld dans Le Monde, en avril dernier. Le film était devenu invisible au cinéma. Restauré par la Warner, en DCP numérique haute définition, il est à nouveau visible, en avant-première internationale. Et c’est un film inoubliable.

Al Jolson
De son vrai nom Asa Yoelson, Al Jolson, un Russe lituanien, né en 1886, s’embarque jeune pour les USA, contre la volonté de son père, chantre et mohel. Après quelques apparitions dans des « minstrel shows », il devient chanteur populaire à New York. Puis, de Broadway aux studios d’enregistrement, il déchaîne les passions et s’ouvre les portes d’Hollywood avec une première apparition dans Mammy’s Boy de D.W. Griffith (1923). Le Chanteur de jazz le consacre définitivement. Mais à la fin des années 1930, sa carrière s’essouffle. Il chante pour les troupes pendant la Seconde Guerre mondiale et la guerre de Corée, avant de s’éteindre en octobre 1950. Un biopic lui a été consacré en 1946 : Le Roman d’Al Jolson (The Jolson Story) d’Alfred E. Green, avec Larry Parks dans le rôle-titre.

La première au Warner Theater à New York
Le 6 octobre 1927, c’est devant un parterre de 1 300 personnes que le film est projeté. Lorsque le personnage d’Al Jolson, après la chanson Dirty Hand, Dirty Face, lance le célèbre « Wait a minute ! Wait a minute !  You ain’t heard nothin’ yet. Wait a minute, I tell ya, you ain’t heard nothin’ ! », la foule l’acclame longuement. Le parlant, auquel Warner sera définitivement associé, est là, pour toujours.

Remakes et citations
Le film fera l’objet de remakes : un de Michael Curtiz en 1952 et un autre de Richard Fleischer en 1980. On dénombrera aussi de nombreux clins d’œil au film dans d’autres productions. Récemment dans Aviator (2004) de Martin Scorsese, dans lequel Howard Hughes, visionnant le film, annonce : « Le muet ne vaut plus rien ! » Et surtout dans Chantons sous la pluie (Singin’ in the Rain, 1952), chef-d’œuvre de Gene Kelly & Stanley Donen, racontant les débuts du parlant, qui ouvrit la 2e édition du festival Lumière et où Donald O’Connor imite Al Jolson.


Le Chanteur de jazz (The Jazz Singer)
États-Unis, 1927, 1h28, noir et blanc, format 1.33
Réalisation : Alan Crosland
Scénario : Alfred A. Cohn, Jack Jarmuth, d’après la nouvelle The Day of Atonement d’Alfred A. Cohn et la pièce The Jazz Singer de Samson Raphaelson
Photo : Hal Mohr
Musique : Louis Silvers
Montage : Harold McCord
Production : Sam Warner, Jack L. Warner, Warner Bros.
Interprètes : Al Jolson (Jakie Rabinowitz), May McAvoy (Mary Dale), Warner Oland (le chantre  Rabinowitz), Eugenie Besserer (Sara Rabinowitz), Otto Lederer (Moisha Yudelson), Bobby Gordon (Jakie Rabinowitz à l’âge de 13 ans), Richard Tucker (Harry Lee), le chantre Joseff Rosenblatt (dans son propre rôle), Nat Carr (Levi), William Demarest (Buster Billings), Anders Randolf (Dillings), Will Walling (le docteur), Roscoe Karns (l’agent), Myrna Loy (une fille du choeur)

Avant-première à New York : 6 octobre 1927
Sortie aux États-Unis: 4 février 1928
Sortie en France : 4 octobre 1929

COPIE RESTAURÉE
Warner / Avant-première mondiale

Restauration par Warner Bros.



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