Harold et Maude

Tourné en Californie et surtout à San Francisco, Harold et Maude s’inscrit dans la veine des films des seventies américaines, entre opposition au militarisme et contestation de l’ordre établi. Hal Ashby confronte l’amour de la vie d’une femme âgée qui a connu les horreurs de l’Holocauste à l’ennui d’une jeunesse oisive qui peine à profiter de l’existence. « Une fois encore, Hal Ashby se signale par sa dilection pour des ambiances joyeusement équivoques. L’agressivité de son propos renforce la puissance du scandale. Percutant. » écrit Gilles Jacob, dans L’Express,  à la sortie du film en août 1972. Comme dans Le Propriétaire, son précédent film, le jeune héros s’affirme dans la contradiction avec la bourgeoisie dont il est issu. Sa mère, personnage indissociable de cet engrenage bien huilé, est envahissante et castratrice, choisissant des jeunes femmes et jouant les entremetteuses pour son fils. Le cinéaste désacralise un à un divers sujets qui questionnent l’opinion au début des années 1970 : rôle de l’Église, de la psychothérapie, de l’absence paternelle, etc. La mort, qu’Harold simule sans cesse par des faux suicides à répétition, est le seul exutoire à ce carcan social, où l’argent, les normes et les apparences prévalent. De ce goût pour le morbide jaillit la vie, dans toute sa fraîcheur, malgré l’âge avancé de la protagoniste Maude. Harold le lunaire et Maude la malicieuse partagent ensemble les visites de cimetière, les enterrements, et le jeune homme lutte pour conserver son corbillard comme moyen de transport quotidien. Mais au contact de Maude, il va découvrir la musique, la désobéissance, les poèmes, le rire, et prendre goût, débarrassé de ses inhibitions, à cette vie spontanée. « C’est d’un apprentissage qu’il s’agit, note Robert Benayoun. Maude apprend à Harold comment abuser de la vie, violer la loi, saper le système. » Accompagné par la musique de Cat Stevens, le film a obtenu un succès international phénoménal. Le deuxième film d’Ashby est devenu un classique, emblème des années 1970 qui savaient allier subversion et émotion. Harold et Maude consacra également ses deux inoubliables comédiens.

Travail universitaire
Colin Higgins est l’auteur du scénario, version remaniée de sa thèse de fin d’études à l’UCLA (University of California, Los Angeles), section scénario.

Le rôle de Maude
De nombreuses actrices sont envisagées pour le rôle de Maude. Bud Cort, qui joue le rôle d’Harold, émet même le souhait que ce soit Greta Garbo. Finalement, c’est Ruth Gordon qui est choisie, l’impressionnante Minnie Castevet de Rosemary’s Baby de Roman Polanski, sorti trois ans avant.

Harold et Maude au théâtre
En 1972, Colin Higgins adapte lui-même le film pour la scène. En deux ans, la pièce sera jouée près de 2 000 fois au Westgate Theater, à Edina, dans le Minnesota. En France, en 1973, c’est Jean-Claude Carrière qui adapte l’œuvre, Jean-Louis Barrault qui la met en scène et Madeleine Renaud qui joue le rôle de Maude. Plus tard, la pièce sera de nouveau montée en France et Danielle Darrieux, puis Line Renaud, en interprèteront le rôle principal.

Cat Stevens
Dans l’Amérique conservatrice de Richard Nixon, Hal Ashby décide de confier la musique de son film, à la fois satire sociale contre l’establishment et véritable histoire d’amour, à Cat Stevens. Intimement liés, l’histoire et la musique parleront aux jeunes générations : « If you want to be free, be free… » Deux chansons ont été spécialement composées pour le film, Don’t Be Shy et If You Want To Sing Out, Sing Out et furent introuvables sur vinyle pendant près de dix ans.