Co-écrit par Olivier Stone, le film est d’abord un polar âpre et brutal. Comme le tournage, qui ne fut pas de tout repos. Robert Towne, scénariste de La Dernière corvée, commença par faire le « script-doctor ». La collaboration tourna court, car Ashby, qui modifia une scène en plein tournage, fâcha Towne. « Robert est devenu furieux, psychotique, se souvient Steve Roth, le producteur du film, cité par Peter Biskind. C’était une espèce d’égocentrique enragé, il était jaloux d’Hal car il était un grand réalisateur. Toutes sortes d’accusations concernant l’abus de drogue lui furent imputées, il disait à Hal qu’il était out.» Malgré cet épisode douloureux, Ashby l’idéaliste signe un film sans concession, où les scènes hystériques s’opposent aux longs plans-séquences évocateurs. La dernière partie, et en particulier la scène finale, est un moment d’anthologie. Le casting est de toute beauté : Jeff Bridges (La Dernière séance de Peter Bogdanovich en 1971, La Porte du paradis de Michael Cimino en 1980) est bluffant de réalisme, Rosanna Arquette, tout juste auréolée de sa performance dans Recherche Susan désespérément (Susan Seidelman, 1985), excelle dans son rôle tandis qu’on assiste à la première apparition à l’écran d’Andy Garcia. Toujours en difficulté avec la drogue, Ashby est renvoyé avant la fin du tournage. Pour la troisième fois de sa carrière, il se retrouve privé de montage, ici au profit de Stuart Pappé qui collabora avec Robert Lawrence. Ashby se battit avec le soutien de la Guilde et obtint un dédommagement mais pas le droit de finaliser son film. N’ayant plus le courage de se battre il baissa les bras. Néanmoins, il parvint à se soigner et remonta la pente à la fin des années 1980. Il confia au producteur Lester Persky : « J’ai perdu huit ans de ma vie ». Lorsqu’il revint dans le milieu, souhaitant démarrer de nouveaux projets, on lui découvrit un cancer du pancréas. Ashby refusa de se soigner, mais, poussé par de nombreux amis et personnalités du cinéma (Warren Beatty, Bruce Dern et Dustin Hoffman notamment) il accepta les traitements, sans succès. Hal Ashby, cinéaste souvent incompris et méconnu, mourut le 27 décembre 1988.
Le dernier au cinéma
Huit millions de façons de mourir est le dernier film pour le cinéma d’Hal Ashby. En 1986 et 1987, il réalisera deux films pour la télévision, avant de disparaître, à l’âge de 59 ans, en 1988.
Lawrence Block, auteur prolifique
Block est l’auteur des romans Huit millions de façons de mourir et Le Coup du hasard, ici doublement adaptés par Ashby qui n’en fait qu’un seul film. Né à Buffalo en 1938, il publie ses premiers ouvrages dans les années 1960. Prolifique auteur de romans policiers et d’espionnage, il a aussi à son actif une centaine de nouvelles. Il créé plusieurs personnages récurrents, comme Bernie Rhodenbarr, libraire et cambrioleur, ou Evan Tanner, agent secret. Souvent récompensé, il est considéré comme un des meilleurs auteurs de polars de sa génération.
Le personnage de Matt Scudder dans la littérature
Matt Scudder est aussi le personnage fétiche de Lawrence Block. Il lui a consacré à ce jour près de vingt ouvrages. En 1983, Huit millions de façons de mourir, le roman, a valu à son auteur le Shamus Award des Private Eye Writers of America et une nomination au célèbre Edgar des Mystery Writers of America.
Oliver Stone
À noter que le film a été co-écrit par Oliver Stone qui, avant de devenir le metteur en scène que l’on sait, fut un scénariste puissant (et déjà controversé) : Midnight Express d’Alan Parker (1978), Scarface de Brian De Palma (1983) ou L’Année du dragon de Michael Cimino (Year of The Dragon, 1985). Après quelques courts métrages et un premier film d’horreur, Oliver Stone est vraiment passé à la réalisation avec Salvador et Platoon en 1986.
8 millions de façons de mourir (8 Million Ways to Die)
États-Unis, 1986, 1h55, couleurs (Technicolor), format 1.85
Réalisation : Hal Ashby
Scénario : Oliver Stone, David Lee Henry, d’après les romans Huit millions de façons de mourir et Le Coup du hasard de Lawrence Block
Photo : Stephen H. Burum
Musique : James Newton Howard
Montage : Robert Lawrence, Stuart Pappé
Décors : Michael Haller
Costumes : Gloria Gresham
Production : Steve Roth, Michael Haller, Producers Sales Organization (PSO)
Interprètes : Jeff Bridges (Matt Scudder), Rosanna Arquette (Sarah), Alexandra Paul (Sunny), Randy Brooks (Willie "Chance" Walker), Andy Garcia (Angel Moldonado), Lisa Sloan (Linda Scudder), Christa Denton (Laurie Scudder), Vance Valencia (Quintero), Wilfredo Hernandez (Hector Lopez), Luisa Leschin (l’épouse d’Hector), Vyto Ruginis (Joe Durkin)
Sortie aux États-Unis : 25 avril 1986
Sortie en France : 12 novembre 1986
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