Billetterie

Bienvenue Mister Chance

Being There

de Hal Ashby , États-Unis , 1979

Toute sa vie, Chance (Peter Sellers) a vécu entre les quatre murs d’une belle propriété de Washington où il exerce ses talents de jardinier. Homme simple, il coule une vie paisible, jusqu’au décès de son employeur et la fermeture du domaine. Valise à la main, il découvre le monde extérieur, irréel et interdit, qu’il ne connaissait qu’à travers la télévision. Quand une voiture le heurte, Chance s’en remet à sa conductrice, Eve Rand (Shirley MacLaine), qui l’emmène chez elle. Il y rencontre son mari Benjamin (Melvyn Douglas), politicien affairiste, puis… le président des États-Unis (Jack Warden). Prenant part aux conversations, Chance distille naïvement quelques proverbes de sagesse. Il ne tarde pas à devenir la coqueluche du pouvoir.

bienvenue-mister-chanceLe film est adapté, par Jerzy Kozinski lui-même, d’un de ses romans, La Présence. On trouve dans les rôles principaux Peter Sellers, Melvyn Douglas, acteur de l’âge d’or hollywoodien, et Shirley MacLaine, sœur ainée de Warren Beatty, rôle principal de Shampoo. Peter Sellers excelle et signe ici son chant du cygne. En effet, peu après avoir été nominé pour l’Oscar du meilleur acteur dans ce film, le comédien mourut d’une crise cardiaque. « Peter Sellers est un géant. Je suis très jaloux de Being There, son dernier film ! » déclara un autre géant, Jerry Lewis. Entrevue confidentielle avec le chef de l’État, prestation colorée dans un talk-show, les situations deviennent grotesques tout en restant crédibles. Les paroles sibyllines de Chance sont perçues comme un message d’espoir : les arcanes du pouvoir s’emboîtent magiquement devant l’ingénu et les puissants s’interrogent. Bienvenue Mister Chance, apologue ouvert, à mi-chemin entre la comédie poético-absurde et la satire de mœurs, permet à Hal Ashby de renouer avec la veine caustique d’Harold et Maude. Une fois encore, le cinéaste tire le portrait de l’Amérique avec cette chronique lucide, minutieuse et sans complaisance, dénonçant le règne de l’audiovisuel et de l’illusionnisme collectif. Il porte un regard acéré sur les rites du pouvoir, les médias, le langage codé de la diplomatie, la politique et l’économie. Il pose ainsi la question suivante : la candeur peut-elle triompher comme le comble de la sagesse ? « Conte moral plein d’immoralités, lit-on dans L’Écran fantastique de novembre 1980, Bienvenue Mister Chance brosse une peinture admirable de cette ingénuité typiquement américaine qui fait chercher à ce peuple d’"enfants" l’image impossible du bon sens. Sellers incarne cette figure allégorique, personnage céleste sans âge ni nationalité, élevé au biberon des mass-médias dont il ne cesse de dénoncer l’absurdité avec l’innocence de l’incorruptible. » Le film obtint d’excellentes critiques et Ashby créa sa propre société, North Star, puis signa un contrat avec Lorimar, alors dirigée par Peter Bart. Ce dernier, cité par Peter Biskind dans le controversé Le Nouvel Hollywood (Cherche-Midi, 2002), raconte que, loin de s’appuyer sereinement sur ses succès récents, c’est à cette époque qu’Hal Ashby commença vraiment à s’isoler, en s’enfonçant plus profondément dans la drogue et la paranoïa.

Avant-dernier rôle
Le personnage de Mister Chance est l’avant-dernier rôle de l’extraordinaire Peter Sellers, et le film est le dernier sorti du vivant de l’acteur. Suivront respectivement en 1980 et 1982 : Le Complot diabolique du Dr. Fu Manchu (The Fiendish Plot of Dr. Fu Manchu) de Piers Haggard et À la recherche de la Panthère rose (Trail of the Pink Panther) de Blake Edwards. L’épitaphe de Benjamin Rand, joué par Melvyn Douglas, Life is a state of mind, est également inscrite sur la propre tombe de Peter Sellers.

Jerzy Kosinski
L’auteur de La Présence, le court roman adapté pour le film, est né sous le nom de Józef Lewinkopf à Łódz, en Pologne, en 1933, dans une famille d’intellectuels et d’artistes juifs. Éloigné par son père à l’est de la Pologne pendant la guerre, il perd une grande partie de ses proches, victimes de l’Holocauste. Il ne retrouve ses parents qu’en 1945 et émigre aux États-Unis en 1957. Trois ans plus tard, il publie ses premiers écrits sous pseudonyme. Mais c’est en 1965, avec L’Oiseau bariolé, son premier roman, qu’il acquiert une renommée internationale. Le livre retrace, à travers l’histoire du petit Jurek, l’horreur des persécutions dans la Pologne de la Seconde Guerre mondiale et la survie à l’Holocauste. En 1981, il campe un extraordinaire Zinoviev dans Reds de Warren Beatty. Jerzy Kozinski s’est suicidé le 3 mai 1991. Jérôme Charyn évoque cette figure tragique et polémique dans Jerzy Kosinski (Denoël, 2011).



Bienvenue Mister Chance (Being There)
États-Unis, 1979, 2h10, couleurs, format 1.85
Réalisation : Hal Ashby
Scénario : Jerzy Kosinski d’après son roman La Présence
Photo : Caleb Deschanel
Musique : John Mandel
Montage : Don Zimmerman
Décors : Robert Benton
Costumes : May Routh
Production : Andrew Braunsberg, Lorimar Film Entertainment, Northstar International
Interprètes : Peter Sellers (Chance), Shirley MacLaine (Eve Rand), Jack Warden (le président des États-Unis), Melvyn Douglas (Benjamin Rand), Richard Dysart (Dr. Robert Allenby), Richard Basehart (Vladimir Skrapinov), Ruth Attaway (Louise), Dave Clennon (Thomas Franklin), Fran Brill (Sally Hayes), Denise DuBarry (Johanna Franklin), Alice Hirson (l’épouse du président)


Sortie aux Etats-Unis : 19 décembre 1979
Présentation au Festival de Cannes : 21 mai 1980
Sortie en France : 13 aout 1980

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